Même si tous les éléments constitutifs d'une infraction sont réunis, et même si celle-ci a eu un résultat nuisible, son auteur peut ne pas être responsable pénalement s'il avait le droit, l'autorisation voire le devoir de la commettre, eu égard à une circonstance particulière.

Le fait justificatif est une conjoncture extérieure à l'auteur de l'infraction qui, précédant ou accompagnant sa commission peut légitimer l'acte répréhensible commis en effaçant totalement ou partiellement son caractère délictueux et, par suite, exclure ou atténuer la responsabilité pénale de son auteur, selon les cas d'espèce

Les faits justificatifs sont aux nombres de 3 :

  • La prescription ou l'autorisation de la loi ou du règlement; le commandement de l'autorité légitime

  • La légitime défense des personnes ou des biens

  • L'état de nécessité

NOTA : le consentement de la victime n'est pas un fait justificatif, mais il commet le même effet dans certains cas

Le fait justificatif entraîne les effets suivants :

  • Il rend l'acte licite et conforme au droit

  • Il supprime l'infraction elle-même, d'une manière absolue, et à l'égard de tous ceux qui y ont participé à titre de co-auteurs ou complices

  • Il constitue pour l'auteur un moyen de défense (c'est à lui d'en apporter la preuve)

  • Il exclut la responsabilité civile (sauf en ce qui concerne l'état de nécessité)

L'admission complète d'un fait justificatif par la juridiction pénale entraîne :

  • De la part du ministère public : Un classement sans suite

  • De la part de la juridiction d'instruction : Un arrêt de non-lieu

  • De la part de la juridiction de jugement : Un jugement ou arrêt de relaxe ou d'acquittement

1.1 - LA PRESCRIPTION OU L'AUTORISATION DE LA LOI OU DU REGLEMENT – LE COMMANDEMENT DE L'AUTORITE LEGITIME

1.11 – La définition et le domaine d’application

N'est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par la des dispositions législatives ou réglementaires

N'est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte commandé par l'autorité légitime, sauf si cet acte est manifestement illégal

La disposition légale vaut pour toutes les infractions : Crimes, délits, contraventions

La prescription ou l'autorisation de la loi ou du règlement, le commandement de l'autorité légitime justifient toutes les infractions. Art R. 624-1 et R. 625-1 du CP

Cela légitime aussi la violation de secret professionnel, lorsque la loi le prévoit

Cela légitime l'atteinte à la liberté individuelle que constitue l'arrestation en cas de crime ou délit flagrant puni d'une peine d'emprisonnement

1.12 – Les éléments constitutifs

Pour qu'il y ait fait justificatif, la loi exige UNE des deux conditions suivantes :

  • La prescription ou l'autorisation de la loi ou règlement

      • Ce que le texte législatif ou réglementaire impose formellement

      • Ce que le texte législatif ou réglementaire autorise ou permet

      • Ce que la coutume autorise ou permet (cas de la gifle du père à l'enfant)

  • Le commandement de l'autorité légitime (sauf si l'acte est manifestement illégal)

      • Ce que commande un supérieur hiérarchique régulièrement investi de son pouvoir par la puissance publique


1.13 – Les conséquences (3 hypothèses sont à considérer) :

  1. Le commandement de l'autorité légitime n'est pas accompagné de la prescription ou de l'autorisation de la loi ou du règlement ou même est donné en contradiction par rapport au texte :

  • S'il s'agit d'atteinte à la liberté individuelle et d'abus d'autorité, la loi décide que le commandement illégal de l'autorité légitime ne vaut pas fait justificatif


  • Il ne peut y avoir cause d'exemption de peine qu'en vertu d'un texte formel. Peut-il par contre y avoir un fait justificatif pour celui qui à obéi à un ordre illégal ? :

        1. Le civil est en principe toujours considéré comme responsable des actes délictueux commis à la suite d'un ordre illégal d'un cadre

        2. Le militaire n'est en principe responsable que s'il a obéi à des ordre

d'un supérieur dont l'illégalité était manifeste

      1. La prescription ou l'autorisation de la loi n'a pas été accompagnée du commandement de l'autorité légitime. Celui qui accomplit l'acte prescrit ou autorisé n'a d'ordre à recevoir d'aucun supérieur hiérarchique. (Ex : Le citoyen qui appréhende l'auteur d'un crime ou délit flagrant, le JI qui délivre un mandat d'arrêt, le médecin qui déclare une maladie contagieuse)

      1. La prescription ou l'autorisation de la loi ou du règlement est accompagnée du commandement de l'autorité légitime

Parfois, à elle seule, la prescription ou l'autorisation d'un texte n'a pas d'effet justificatif. Il faut parfois que l'ordre soit donné pour justifier l'acte. Ex : Un OPJ tient de la loi le pouvoir de procéder à des arrestations : il ne peut agir cependant en dehors du cas de l'infraction flagrante, que sur mandat du JI, sinon il se rend coupable d'arrestation arbitraire

2.2 – LA LEGITIME DEFENSE DES PERSONNES ET DES BIENS

2.21 – La définition et le domaine d’application

La légitime défense est non seulement la droit de se défendre ou de défendre autrui contre une agression injuste, mais aussi le droit de défendre un bien pour interrompre l'exécution de l'agression exercée à son encontre

N'est pas pénalement responsable la personne qui, devant une atteinte injustifiée envers elle-même ou autrui, accomplit, dans le même temps, un acte commandé par la nécessité de la légitime défense d'elle-même ou d'autrui, sauf s'il y a disproportion entre les moyens de défense employés et la gravité de l'atteinte. Art 122-5, al.1 du CP

N'est pas pénalement responsable la personne qui pour interrompre l'exécution d'un crime ou d'un délit contre un bien, accomplit un acte de défense, autre qu'un homicide volontaire, lorsque cet acte est strictement nécessaire au but poursuivi dès lors que les moyens employés sont proportionnés à la gravité de l'infraction. Art 122-5, al.2 du CP

En principe, tout fait ordinairement incriminé par la loi n'est pas punissable, s'il a été commandé par la nécessité de la légitime défense de soi-même d'autrui ou d'un bien. Il faut donner une portée générale à l'article 122-5, al.1 et 2 du CP

2.22 – Eléments constitutifs

  1. Conditions relatives à l'agression :

  • Il faut que l'acte d'agression :

        • Soit dirigé contre la personne (ou contre un bien) : qui se défend ou contre toute autre personne, et menaçant la vie, l'intégrité corporelle, la liberté physique, l'inviolabilité du domicile, le vol sur la personne, ou dirigé contre un bien : (ne s'applique pas à l'honneur ou à la réputation d'une personne)

  • Soit actuel : Le danger doit être imminent (ni futur, ni passé, ou le mal accompli)

  • Et injuste : L'acte d'agression ne doit pas résulter de l'accomplissement d'un devoir ou de l'exercice d'un droit

  1. Conditions relatives à la défense :

  • Il faut que par rapport à l'acte d'agression, l'acte de défense :

    • Soit nécessaire : Il faut que la personne attaquée n'ai aucun moyen de se soustraire au danger. La question se pose alors si elle pouvait se soustraire au danger par la fuite. Mais en principe celle-ci ne peut jamais être une obligation pour la personne attaquée, il s'agit d'une question de fait. (ainsi la légitime défense ne pourra être admise au bénéfice du fils qui blesse son père alors qu'il avait la possibilité de fuir devant son attaque (notion de respect familial)

    • Simultanée : Il faut que la réaction de défense soit immédiate par rapport à l'attaque : Une infraction commise soit pour prévenir un danger futur, soit pour se venger d'un mal déjà fait, ne peut pas être justifié par la légitime défense

    • Proportionnée : L'état de légitime défense ne confère pas au titulaire de ce droit, la faculté d'infliger un mal illimité à l'agresseur.

Nota : Cas particulier de la défense des biens : Il ne peut constituer en un homicide volontaire

2.23 – Les cas particuliers

  1. Résistance à un acte illégal ou arbitraire d'une autorité :

  • En principe la jurisprudence ne tient pas compte des circonstances de l'infraction pour sanctionner l'homicide ou les violences envers les dépositaires de l'autorité et de la force publique. Elle n'admet pas la légitime défense, même dans le cas d'une résistance à un acte illégal, et qualifie ce fait d'acte de rébellion

  • Pour que l'acte de rébellion devienne un acte de légitime défense, la jurisprudence exige le cas extrême d'une "illégalité irréparable et insupportable", qui peut se matérialiser par une résistance opposée à un fonctionnaire :

    • Agissant manifestement hors de ses fonctions

    • Agissant sans ordre ou refusant de produire l'ordre dont il est porteur

    • Voulant faire un acte défendu par un des textes de loi précis

(ex : la personne passée à tabac qui riposte est en état de légitime défense)

  1. Résistance à une attaque provoquée :

  • Le caractère illicite de l'agression subsiste, en particulier lorsque l'agresseur bénéficie d'une cause légale d'irresponsabilité pénale. Ainsi la riposte à une personne démente ou à un de 13 ans est légitime si elle est proportionnée

2.24 – Les situations présumées de légitime défense Art 122-6 du CP

Est présumé avoir agit en état de légitime défense celui qui accomplit l'acte :

  • Pour repousser de nuit l'entrée par effraction, violence ou ruse dans un lieu habité

  • Pour se défendre contre les auteurs de vols ou de pillages exécutés avec violences

Il s'agit d'une présomption simple, donc susceptible d'être renversée par la preuve contraire

Lorsque l'un de ces actes est reconnu, la personne est considérée comme bénéficient d'une présomption de légitime défense. Au lieu d'avoir à faire la preuve de son état de légitime défense, il lui suffit d'apporter la preuve plus simple des faits

2.3 – L'ETAT DE NECESSITE

2.31 – La définition et le domaine d’application

Le code pénal consacre et systématise la jurisprudence relative à l'état de nécessité : N'est pas pénalement responsable la personne qui, face à un danger actuel ou imminent qui menace elle-même, autrui ou un bien, accomplit un acte nécessaire à la sauvegarde de la personne ou du bien, sauf s'il y a disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace

2.32 – Les éléments constitutifs

Pour qu'il y ait fait justificatif, l'état de nécessité doit satisfaire à 3 conditions :

  1. Nécessité vraie : C'est à dire que le péril soit imminent et qu'il n'y ait aucun autre moyen d'éviter le dommage menaçant; une simple raison de commodité ne suffit pas

  1. Proportionnelle entre la gravité de l'acte et la gravité du mal évité : Le bien ou l'intérêt sauvegardé doit être d'une valeur manifestement supérieure à celle du bien ou de l'intérêt sacrifié

  1. Absence de faute à l'origine de la nécessité : Cette dernière condition est cependant controversée par certains auteurs. ex : personne qui cause un incendie par imprudence et qui défonce la porte d'un voisin pour se sauver (cela peut être un état de nécessité)

 


Les faits justificatifs
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